cist

Beaucoup d’eau sous les ponts

Rendez-vous incontournable des amateurs de science de toutes générations, la « Fête de la science » va à nouveau battre son plein du 8 au 16 octobre 2016. A Aniane, différentes associations, collectifs et habitants ont décidé de se rassembler pour proposer ensemble, autour du Centre de l’Imaginaire Scientifique et Technique (CIST) du Cœur d’Hérault, deux journées de découverte.

Les deux journées de découverte seront centrées sur les thèmes majeurs : l’eau et l’influence grandissante de la robotique. Sont prévues la découverte d’un espace superbe disposant d’un patrimoine hydraulique méconnu à proximité de l’abbaye d’Aniane, ainsi qu’une journée à l’Observatoire astronomique, désormais “piloté” complètement par l’association de passionnés Arts et Astres.

Comment pourriez-vous vous passer du monoxyde de dihydrogène, de l’oxyde d’hydrogène voire de l’hydrogénol, de l’hydroxyde d’hydrogène ou même de l’oxyde dihydrogéné ? Personne ne peut s’en passer ! Toutes ces formulations chimiques averties désignent tout simplement l’eau, essentielle à la vie.

La journée du dimanche 16 octobre intitulée « Oh ! Eau ! » tournera autour de la découverte de cet élément et, tout particulièrement, de son utilisation dans le cadre de l’hydrologie (la science étudiant le cycle de l’eau). Les hydrologues nourrissent désormais de précieuses informations ceux qui pratiquent l’irrigation des cultures… se basant sur d’innombrables systèmes imaginés par des agriculteurs qui, depuis 10.000 ans n’avaient pas tous, peu s’en faut, de connaissances scientifiques !

Le nouveau “parc Germinal” d’Aniane, en cours d’aménagement, a suscité la création du collectif citoyen “Germinal”, rassemblant des citoyens qui ont envie de faire vivre et découvrir ce lieu. Il faut dire que son histoire est passionnante à toutes les époques de l’abbaye, depuis les jardins de moines jusqu’à l’alimentation du tristement célèbre bagne d’enfants et de ses évolutions jusqu’à l’accompagnement judicaire beaucoup plus soft de jeunes. Chaque période a suscité une gestion particulière des ressources en eau de la commune.

Aniane est traversé par le canal de Gignac, possède de beaux lavoirs, le lit de la rivière Corbière en partie aménagé… il y aurait déjà eu de quoi dire ! Mais le parc Germinal, qui se situe dans la continuité d’une “voie verte” encore très peu connue du public, longe un premier grand aqueduc courant au-dessus de la rivière puis un second. On y découvre des bassins de pierres et un ancien puits mécanique actionné par des ânes, qu’on appelle souvent à tort une noria…

Certes, la région a bien d’autres patrimoines fabuleux dans ce domaine. Déjà, le colossal pont du Gard, qui était à l’origine un pont-aqueduc romain sur la voie d’eau créée entre Uzès et Nîmes. Prosper Mérimée le fit classer en 1840. On pense aussi à l’aqueduc Saint-Clément “des arceaux”, dans le quartier du même nom à Montpellier, qui résout un problème crucial d’alimentation en eau identifié au XIIIe siècle avec presque 1.000 mètres sur ses arcades et 14 km de longueur. Sans parler du canal du Midi et ses écluses…

Mais, à plus petite échelle, le parc Germinal permet d’expliquer à peu près tout. Ce beau patrimoine méritait bien une journée de présentation !

L’un des points d’orgue de la journée est une promenade accompagnée par des scientifiques et techniciens hydrologues, des personnes ayant travaillé sur l’histoire du site retraçant non seulement le patrimoine local mais encore des techniques imaginées par les Romains, les Arabes, Léonard de Vinci… ou certaines innovations récentes.

Parmi les intervenants :

• Marc Voltz, Directeur de recherche du Laboratoire sur les Interactions Sol-Agrosystème-Hydrosystème (LISAH) / UMR INRA-IRD) et Professeur consultant à SupAgro, expliquera 50 ans de transformation de l’hydrologie en terre agricole, donnant des pistes de solutions aux problématiques actuelles et à venir. Spécialiste de l’agriculture et de la qualité de l’eau, il travaille plus particulièrement sur comment la pollution et en particulier les pesticides, arrivent à l’eau et circulent grâce à l’eau en ayant des conséquences sur les cultures.

• Sabine Ternon, anianaise, commentera en avant-première la projection d’un film documentaire qu’elle vient de réaliser sur l’irrigation et les caves coopératives de l’Hérault, qui montre des hypothèses très différentes pour faire face aux défis de demain.

Ce sera aussi une belle occasion pour les enfants de découvrir, entre autres, des techniques aussi étonnantes que le chadouf, la noria, la vis d’Archimède, les puits actionnés par des chameaux ou des ânes… Le travail réalisé avec certains élèves de l’école d’Aniane depuis début septembre, dans le cadre des temps périscolaires, sera aussi restitué.

J’ai choisi de garder pour mon prochain article l’interview passionnante d’Ahmed Chemori, chargé de recherche CNRS au Laboratoire d’informatique, de Robotique et de Microélectronique de Montpellier (LIRMM) / Université Montpellier – CNRS (Institut INS2I), qui lui, interviendra le samedi 15 octobre à l’Observatoire d’Aniane, avec nombre de films étonnants afin de détailler l’actualité mondiale et l’avenir de la robotique ainsi que quelques unes des réalisations de son laboratoire montpelliérain, contribuant à améliorer les capacités de nombreux domaines (robotique chirurgicale, de manipulation, humanoïde et sous-marine, vision artificielle…).

Par Frédéric Feu

Du crocs au salagou ?

Les dents du lac : une aventure biologique

Lors d’une récente immersion pour effectuer des relevés topographiques à proximité de l’ancien village submergé de Celles dans le lac du Salagou, une surprise aussi passionnante que déplaisante attendait l’un des plongeurs. Récit :

Peu frileux, il n’avait pas mis de gants malgré la température de l’eau encore plus que fraiche, et sentit une vive douleur sur le côté droit de sa main droite. Comme il venait de brasser le fond sa visibilité était plus que diminuée et il n’eut pas connaissance immédiatement de la raison de ce “désagrément”.

Sorti de l’eau quelques minutes après, il put constater avec ses collègues une profonde morsure sur 4 ou 5 cm de chair, ne ressemblant pas à quelque chose qu’il connaissait. Bien sûr, inquiet de savoir s’il ne s’agissait pas d’un poisson ou serpent éventuellement venimeux, il décida d’aller rapidement aux urgences de Montpellier : grand bien lui en prit ! Après analyse au centre antipoison de Marseille, on lui confirma la présence de toxines en quantité raisonnable mais d’un type relativement agressif. Les experts s’inquiétaient de ne pas réussir à identifier ni les toxines ni la forme de la morsure, cependant, ils écartaient d’emblée celle d’un serpent aquatique. On aurait dit qu’un minuscule piège à loup s’était refermé violemment sur sa main.
Désinfecté, Bernard Stocoud fut suivi quelques heures, effectua une déclaration à la gendarmerie.
Le week-end suivant il accompagna ses enfants au Seaquarium du Grau-du-Roi. Discutant avec un biologiste, alors qu’il attendait le prochain spectacle des phoques, il lui montra sa main qu’il avait évitée de bander pour que les plaies sèchent plus vite : quelle ne fut sa surprise ! Parlons même d’un choc : la répartition des dents, l’angle d’incision… tout, selon cet expert des requins, correspondrait point par point aux traces d’un petit squale !

Des requins dans le Salagou ???
N’allons pas si vite… Il s’agit avant tout de bien définir ce qu’est un requin. Le géomètre se permit de rappeler au biologiste que la morsure était venimeuse. Les requins ont déjà une noire réputation très exagérée sans, qu’en plus, on les croie empoisonnés !
« Bien sûr que si, ça existe » répondit le biologiste : parmi les centaines d’espèces de requins connus, Bernard apprit qu’en marge du gigantesque et pacifique requin-baleine il en existe de toutes tailles et de toutes formes, que les requins sont des cousins extrêmement proches des raies, et qu’il en existe non seulement des venimeux mais encore des lumineux, aveugles… que certains sont aussi plats que les raies, alors que certaines raies ressemblent, elles, plus à des requins, etc. C’est alors le problème de l’eau douce du Salagou qui fut évoqué : pas très sérieuse l’hypothèse d’un requin d’eau douce ? Bien sûr que si, cela semble assez plausible. En effet, à l’instar du crocodile et de nombreuses créatures aquatiques, il existe des espèces de requins vivant aux embouchures des fleuves parfaitement acclimatées à des eaux peu salines.
Dans tous les cas, la découverte, ou disons pour l’instant “l’événement”, se doit d’être vérifié. N’y a-t-il pas erreur sur le type d’espèce identifié ? Comment une forme de requin aurait-elle pu se retrouver dans un lac n’ayant pas de communication directe avec la Méditerranée ? Serait-ce un ou des individus jetés par un collectionneur de N.A.C. ? Les amateurs de Nouveaux Animaux de Compagnie adorent les terrariums et aquariums occupés par de superbes bestioles effrayantes telles que des pythons molure albinos, tarentules et autres poissons venimeux asiatiques… Toujours est-il qu’il va désormais falloir faire un peu attention lors des baignades, car il ne s’agissait peut-être là que d’un bébé. L’équipe du consultant en biologie Roy Scheider de l’Institut océanographique américain Brody, actuellement en train d’étudier de nouveaux bassins au Requinarium du Grau-du-Roi, a accepté d’effectuer des plongées “pédagogiques” pour montrer comment on devrait opérer si un jour il y avait un problème. Une initiative éducative et bien sûr médiatique pour le Seaquarium, qui servira de base à l’expérience. Si des jeunes de 16 à 20 ans désirent profiter du stage, il est prévu de leur mettre à disposition des tenues de plongée complètes, avec un latex tressé de fils d’acier qui les protègera sans problème contre une agression isolée ou massive.
L’équipe de C le Mag et de la radio RPH seront sur place pour couvrir l’événement, et il sera remis aux jeunes apprentis plongeurs une médaille du courage ainsi qu’à leurs parents, qui pour leur part ont juste une petite décharge de responsabilité à signer avant la plongée. Bien sûr en imaginant qu’un individu d’une espèce nouvelle soit identifié, un nom scientifique lui serait donné, et cela renforcerait encore, si besoin est, la visibilité touristique du lieu.
Pour sa part, Philippe Martin, spécialiste de la macrophotographie, pense qu’il pourrait s’agir d’un canular mais a néanmoins planté sa tente avec tout son équipement hyper-focus sur l’endroit le plus proche de l’événement initial. Passer directement du premier témoignage sur une espèce non encore identifiée à une image nette à 100%, ce serait une première mondiale qu’il ne peut évidemment risquer de manquer. Surtout dans un chef d’œuvre environnemental dont il passe sa vie à vanter les mérites.
Concernant l’équipe du Centre de l’Imaginaire Scientifique et Technique du Cœur d’Hérault (C.I.S.T.), des interventions dans les écoles viennent d’être programmées in extremis en mai et juin pour rassurer les populations en leur faisant bien voir la différence entre les gigantesques carnassiers de carton des films américains et ces merveilles de l’évolution que sont nos amis les requins.

Par Frédéric Feu