Rock

Little Green Fairy

(Garage rock’n’roll / Sète)

Formation

  • Rauky (guitare / chant)
  • Shap (guitare)
  • Guillaume (basse)
  • Pippo (batterie)

Discographie

  • Green Feedback On You!!! (2002)
  • Burn Witch Burn (2004)
  • Stuck Out Of Time (2010)
  • A Lighthouse In The Darkness (2013)
  • A Thousand Endless Nights (2018)
  • Games, sex and life (2021)

Plus de vingt ans après ses débuts, la Petite Fée Verte sétoise revient dans les télex avec un vinyle partagé avec ses frères de sang The Sonic Preachers, parfaite occasion pour une petit entretien avec l’inamovible Rauky !

C le Mag : Bonjour Rauky ! Même si on met de côté ton imposant cursus au sein de l’underground sétois, on peut dire que Little Green Fairy est un de ces groupes les plus anciens encore en activité, la démo remontant à quelque chose comme vingt-et-un ans. Cinq albums ont suivi malgré les changements de line-up, quel est le carburant pour continuer contre vents et marées, particulièrement en cette période maussade ? 

Rauky : Le Rock’n’Roll est comme une drogue, c’est carrément vital pour moi, je n’imagine pas ma vie sans jouer. De plus concernant la situation actuelle, c’est souvent lorsqu’on est acculé que l’on réagit le plus violemment, il faut toujours se méfier des animaux blessés (rires) !

ClM : La principale actualité du groupe est la sortie du splendide split LP avec The Sonic Preachers, peux-tu nous parler de l’enregistrement avec Chris Bailey ? Qui a eu l’idée de la reprise du Cure (A Forest) ? 

R : On projetait d’enregistrer avec Rob Younger mais il vit à Sydney ! Et puis un jour je feuilletais un fanzine où Rob disait que Chris Bailey était un producteur trop sous-estimé. Mais bien sûr ! Je le connais, il habite à Amsterdam depuis trente ans et il a dit oui de suite ! On a passé quatre jours de folie, très studieux et fêtards à la fois. Chris est une belle personne, il n’est pas trop directif et a de bonnes idées d’arrangements, le bonheur en somme ! Quant à la reprise, l’idée de base vient de Marco l’ex-guitariste après une jam nocturne…

© Sandra di Chiappari

ClM : Des compositions ont-elles vu le jour pendant les jours sombres loin des planches ? 

R : Carrément, nous entrons en studio, toujours à la “Butte Ronde” pour enregistrer un nouvel album ! Car nous n’avons encore rien enregistré avec Pippo notre nouveau batteur, il me tarde, nous avons vraiment de la matière, les mois de confinement on été très prolifiques sur ce point-là !

ClM : On serait curieux de savoir comment un morceau est construit chez LGF et quels sont les sujets que vous vous interdiriez d’aborder… En effet la Fairy a un langage cru, une attitude furieusement rebelle, que pense-t-elle du monde qui l’entoure ? 

R : Cela dépend : soit nous partons d’un riff et construisons autour, ou bien l’un de nous arrive avec un morceau (souvent Shap) pratiquement terminé. Quant aux paroles, elles sont en général sombres et désabusées et permettent plusieurs interprétations. Le thème principal reste la dualité Bien/Mal qui existe en chaque être humain, l’ombre et la lumière qui sont pour moi indissociables… Il n’y a jamais de paroles engagées politiquement, ce n’est pas mon truc !

ClM : Cruciaux pour un groupe, les concerts permettent de se libérer, de vendre quelques disques, d’aller à la rencontre du public, comment vivez-vous l’incertitude de pouvoir vous produire régulièrement ? Des dates sont-elles en négociation ? 

R : Ce n’est pas vraiment évident de ne pas pouvoir se projeter dans le futur, c’est un moteur essentiel dans le fonctionnement de l’être humain donc forcément nous ressentons une certaine frustration… Notre chance est que lors du confinement, Guillaume et Pippo sont arrivés et cela nous a permis d’avoir plus de temps pour bosser avec la nouvelle formation. Apparemment les concerts reprennent, nous avons une dizaine de dates à partir du mois d’avril, d’autres sont en pourparler, wait and see !

Par Ged

Retrouvez le groupe Little Green Fairy sur internet : https://littlegreenfairy.bandcamp.com/

Mad Birds

(Punkabilly rock’n’roll / Montpellier)

Formation

  • Phil (guitare / chant)
  • Mickey Woodslapper (contrebasse)
  • Val (batterie)

Discographie

  • Psycho surfer don’t wanna die (CD-2016)

Les oiseaux doux-dingues de retour sur les platines ! Le successeur de Psycho surfer don’t wanna die s’est fait attendre mais entre les contraintes sanitaires et un changement de batteur (Chicken se consacrant désormais à Darjeeling Opium), ça se comprend. Mais Phil (guitare / chant) n’est pas du genre à baisser les bras : “Malgré le Covid-19, on a quand même réussi à faire quelques trucs ; des compos, une maquette, et (très peu) de live. S’il y a eu de l’isolement, c’est un isolement physique et imposé. Une vraie passion ne peut pas disparaître à cause d’un virus !”

Northern railroad contient onze titres en anglais mais certains flirtent avec le français (Hel est très beau) et l’espagnol : “le texte de la chanson-titre a été écrit à 80 % par ma femme qui de Lille, dans le TGV pour rentrer chez elle, m’envoyait des messages. En gros le texte parle de séparation, et qu’un jour nous n’aurons plus besoin de ce train pour être ensemble. Pour Holy hel, c’est une chanson que j’aime beaucoup et qui semble plaire. En traduisant le texte mot à mot, je me suis rendu compte que cela collait bien ; ce qui est rare. Quant à l’espagnol, je parle trop peu pour prétendre écrire dans cette langue.”

La bonne idée d’avoir sorti l’album sur cire noire (et la pochette de Patrice Poch le méritait) n’a pas dû être une sinécure vu que les marchands de soupe se sont jetés sur le filon commercial…et pourtant : “Après un loupé sur le premier qui du coup n’est sorti qu’en CD, il était important pour nous que celui-ci permette aux gens d’écouter la musique avec la chaleur et les craquements que seul un vinyle peut restituer. On a fait faire 500 exemplaires, mais nous n’avons pas été trop impactés car nous avons lancé la fabrication juste au bon moment.”

Certains morceaux sont sur la setlist live depuis un moment, on se demandait si la composition était collective : “Le disque aurait dû sortir juste au moment où cette pandémie nous est tombée dessus. Et boum, tout s’arrête pendant deux ans. On a préféré retarder la sortie car les gens avaient bien trop de préoccupations pour y prêter attention. En général je compose le morceau que je propose ensuite, les modifs s’imposent d’elles-mêmes car on travaille pas mal la structure qui pour moi est aussi importante que la seule chanson.”

L’écoute ne décevra pas les fans de rock’n’roll puriste et sans fioritures comme les grands du genre à leurs débuts. Mais au fait : quid des groupes modernes pour Mad Birds ? Phil avoue : “Je ne suis pas très curieux, je n’ai pas le réflexe de chercher de nouveaux trucs. Je n’ai aucune excuse avec tous les moyens actuels. Toutefois il y en a un qui n’est ni récent, ni inconnu, c’est Reverend Horton Heat : ses compos me scotchent et c’est un grand guitariste en plus du reste. Mais je ne pense pas qu’un groupe en particulier m’ait influencé, c’est tout ce que j’ai pu découvrir et écouter depuis longtemps, du punk rock à la country : Ramones, J. Cash, Cramps, Undertones, Buddy Holly…” 

L’enregistrement avec Spi (O.t.h. / Naufrages) est devenu une habitude, on le soupçonne même d’avoir dégainé l’harmonica, avec raison : “J’aime bien travailler avec lui, on a souvent la même vision, il est calme et s’investit en proposant des idées d’arrangements. Du coup, c’est bien lui qui joue de l’harmo sur le disque.” Espérons donc des retrouvailles dans un club bouillant pour la dose de décibels, à bientôt ! “Pouvoir jouer live nous manque, ça reprend, mais vraiment doucement. On a pas le cul sorti des ronces, mais on y croit.”

Par Ged

Retrouvez le groupe Mad Birds sur internet : www.facebook.com/themadbirds

Hey ! Punk rockers… de Noël !

Dans la lignée des cadeaux de Noël les plus improbables, je vous conseille fortement d’éviter le Christmas album Stocking Stuffer des légendaires Fleshtones et de préférer de peu Merry Christmas (I Don’t Want to Fight Tonight) des cultissimes Ramones.

Heureusement l’un comme l’autre ne sont même pas trouvables en France, même dans les bacs des plus underground revendeurs de “vinyls collectors”. La tradition des morceaux célébrant la nativité est beaucoup plus ancrée chez les Anglo-Saxons que chez nous. C’est donc les oreilles de Santa Claus qui souffrent. Oublions donc ce subterfuge utilisé pour pouvoir dire à mon directeur de rédaction que j’écris un article sur Noël, et passons à une approche plus directe : viva le rock ! 

Il y a quelque jours passaient à la Secret Place de Saint-Jean-de-Védas le groupe Fleshtones dont je ne peux parler à la radio (j’officie également à RPH pour l’émission Les découvreurs de l’impossible) car j’ai bien trop peur qu’un auditeur ose tenter un appel pour dire quoi que ce soit de négatif sur ce band pour lequel je n’ai ni recul ni impartialité : ce sont des génies ! Vous êtes prévenus, tout courrier de réclamation sera brûlé dès son arrivée !

Qui sont les Fleshtones ?

Un groupe de gamins de ces familles d’immigrés polonais qui pullulent dans le Queens de New-York. Ils se réunissent et, dès 1976, mélangent du rhythm and blues, de la surf music (etc.) en un rock ultra-énergique que l’on qualifie maintenant de “proto-punk”.

Pour comprendre ce mouvement il faut se souvenir des origines du punk, qui naît au milieu des années 1970 plus comme un état d’esprit que comme un mouvement artistique… A Londres en 1976 ce sont bien sûr les Sex Pistols avec Johnny Rotten et Sid Vicious qui, avec le relooking et les conseils de Malcom McLaren et Vivienne Westwood vont lancer une esthétique bien connue : celle des cheveux lissés à la bière, des myriades de boucles d’oreille et de trous dans les tee-shirts et les jeans. Pour parfaire le tout, une vulgarité assénée violemment comme une blague et son cortège d’irrévérences envers la Reine et l’univers. Mais c’est un peu court. Certes les Sex Pistols sont un vrai groupe, avec de vrais morceaux mais ils croisent déjà les Clash, The Jam et tant d’autres qui, sans être obligatoirement définis comme punks sont des groupes qui ont aussi un rock limpide, agressif, qui tranchent avec le reste de la culture baba-cool et de la pop music pour papa-maman.

Quoi qu’on en dise, les Anglais avaient été fortement impressionnés par les New York Dolls, Iggy Pop et ses Stooges et autres pré-punks américains.

Aux États-Unis en 1976 le mot “punk” existe d’ailleurs déjà. Il définit des groupes de rock qui hésitent entre baser leur musique sur les Beatles, sur les Rolling Stones ou sur les Beach Boys. Dans tous les cas c’est pour produire des morceaux eux aussi volcaniques, avec des orgues saturés. Très peu de solos. Le jean est roi et les coupes au bol tentées avec des cheveux de trente centimètres sont assez reconnaissables. Les Sonics, les Seeds… avaient précédé les Ramones de peu.

Eh ben, les Fleshtones, voyez-vous, c’est tout ça en même temps ! Et plus encore !

Comprenez des pré-punks, fans de surf et de Sixties, qui ont terminé leur acné dans les fêtes qui ont suivi la fin de la célèbre Factory – Warhol leur a donné plus tard un coup de pouce.

Les Fleshtones vont avoir l’immense privilège d’être programmé régulièrement au CBGB, un petit lieu ultra sommaire, quand même moins que la Cavern où jouaient auparavant les Beatles à Liverpool, mais qui devint la Mecque de mes groupes préférés : c’est là qu’ont éclaté les Ramones, Blondie, Television… On y programmait souvent Patti Smith, Johnny Thunders, The Cramps, les Runaways de Joan Jett (vous savez : “I Love Rock ‘n’ Roll !” qu’on écoute autant dans les anniversaires et autres “pacsages” des quinquas et plus que “Quelque chose en toi” de Téléphone ou “Hells Bells” d’AC/DC.  C’est là, au CBGB que les Fleshtones ont rencontré Allan Vega l’ultra créatif leader de Suicide qui leur proposa de les aider pour l’enregistrement de leur premier disque.

Le concert de la Secret Place présente un avantage : c’était les Fleshtones, tout simplement. Un bon paquet de morceaux alignés par quatre membres qui tous étaient là déjà en 1976, qui tous n’ont visiblement pas besoin de déambulateur pour non seulement jouer sur scène mais encore dans la salle au milieu du public dans à peu près n’importe quelle condition.

Il y eut pourtant un moment hors norme que l’on n’est pas peu fiers d’avoir involontairement provoqué en posant des questions (mon fils Harrison et moi-même) : c’est leur guitar-hero Keith Streng qui y a répondu… ou pas répondu… je m’explique. Perso, je leur ai mis une liste sous le nez qui était l’énumération des groupes américains qu’ils citent comme des références dans leur tube “American Beat”. C’était en 1984, un mélange hétéroclite allant de Buddy Holly à James Brown, de Donna Summer aux Plimsouls, autant dire qu’ils propulsaient au pinacle les pères fondateurs du rock et de la soul sur le même plan que des potes du moment qui avaient quasiment le même âge. Et j’ai demandé à Keith de me mettre à jour cette liste qui avait du plomb dans l’aile. Première fin de non-recevoir sur fond de blague : en fait, le groupe lisait tellement à fond la liste de l’époque qu’ils n’arrivaient plus à se concentrer pour faire une réponse. Ils se sont juste exclamés : Wow !! on avait oublié les Ramones !

Autre question, c’est Harrison qui les titille sur tous les nouveaux groupes importants : c’est-à-dire largement diffusés dans les milieux rocks des nouvelles générations et qui relèvent de ce mouvement “garage” (les Hives, pour les plus vieux, se revendiquent clairement des Fleshtones) et des artistes comme Ty Segall n’ont pas pu ne pas les entendre. Et ben là, carrément, trou noir ! Fi des hommages, ils ne voient même pas de qui il s’agit (ah ! ah !).

Cependant, en plein milieu du concert, on se mit à entendre une liste d’artistes américains totalement renouvelée, visiblement scandée à notre attention, suivie directement par un morceau en hommage aux Ramones !! Et là, clairement, pour nous, c’était Noël !!! Faisant partie de ces artistes américains qui depuis longtemps ont un public fidèle en France, les Fleshtones sont relativement faciles à voir au moins une fois. La Secret Place semble avoir fait une OPA sur leur présence dans le coin et c’est très bien. De grands groupes dans des lieux intimes, ça déchire toujours…

Nous commençons certes cette nouvelle rubrique avec du rock très appuyé et pas tout jeune mais, une fois n’est pas coutume, Harrison assurera les rencontres avec la création en marche et moi je serai plus souvent sur les rétrospectives, question de génération.

Par Harrison et Frédéric Feu