créatures intelligentes

Extraterrestres d’ici et d’ailleurs – Première partie

Notre ami l’écologue et photographe Philippe Martin basé en cœur d’Hérault, qui publie une fois de plus l’un de ses “recueils d’images” fascinants, nous donne à voir cette fois-ci des créatures des océans telles que nous avons peu de chance de les rencontrer un jour. Non seulement nous plongeons rarement comme lui dans certaines contrées lointaines mais, dans tous les cas, son invention – le procédé “Hyperfocus” – permet de produire des compositions photographiques d’une netteté surréaliste, que renforce encore sa captation de la simple lumière naturelle sans aucun artifice dans des quantités telles que notre œil n’est pas capable normalement de la percevoir.
On assiste ainsi à un cortège de monstres et merveilles, du corail à l’étoile de mer et tant d’autres espèces évoluant dans des environnements qui se révèlent être plus saisissants que n’importe laquelle des surfaces de planètes les plus délirantes imaginées par les meilleurs auteurs de SF !

Même s’il montre une réalité du vivant, l’imagerie de Philippe interroge nos rêves d’autres ailleurs à travers les récits fantastiques que l’homme produit sans interruption depuis l’aube des temps.
Bien que nous disposions de nombreux matériels pour explorer les océans : scaphandres, bathysphères, bathyscaphes, certains types de sous-marins (la plupart des sous-marins faisant partie de l’arsenal militaire, leurs équipements n’étaient pas spécialement prévus pour l’observation naturaliste)… nous avons aujourd’hui également un vaste choix de drones et robots qui peuvent, avec moins de risques, multiplier les terrains d’exploration.

Mais l’homme a une sacrée manie qui consiste, la plupart du temps, à se moquer et se défier de ceux qui imaginent des choses extravagantes et à considérer tout aussi rapidement comme acquises et normales des découvertes aussi hallucinantes soient-elles… Souvenons-nous que lors de la plongée du Trieste dans la fosse des Mariannes par l’équipe d’Auguste et Jacques Piccard, on découvrit des poissons en pleine forme au plus profond du plus profond de l’océan, alors que l’on supposait toute vie impossible au-delà de la moitié de la distance qui fut finalement franchie.
Et depuis, ne passe plus une année sans que nous découvrions d’autres espèces bioluminescentes, aussi sublimes que cauchemardesques, d’autres formes de vie qu’on ne sait même pas où classer et comment nommer selon les classifications et les taxonomies établies. Et il en reste encore à découvrir… et il en reste encore des difficultés à contourner, pour investiguer ces plus de mille milliards de kilomètres3 d’eau pas encore investigués ! (source “Oceanology ”, mai 2010).
Alors, réfugions-nous dans l’imaginaire…

« Histoire véritable ». Faunes, dryades, centaures, hippomyrmèques, psyllotoxotes…
Non, je n’utilise pas ma rubrique du C le Mag pour vous insulter à pleins poumons, tel notre cher capitaine Haddock. Parti comme vous pour vivre ces mois qui nous rapprochent du 21 juillet 2019 à 3 h 56 20 s, heure française, instant où je l’espère bien nous célébrerons le demi-siècle du réel premier pas de l’Homme sur la Lune, je me replonge savoureusement dans la lecture de “L’histoire véritable” de Lucien de Samosate. Ce rhéteur né en Syrie et mort en Egypte au IIe siècle durant l’empire romain, rédigea en grec un récit fantastique adulé par les historiens de la science-fiction qui le considèrent comme une origine de leur genre.
Lucien fut lui-même un grand voyageur et, d’Asie jusqu’en Espagne, il se heurta dans son périple aux colonnes d’Hercule, frontière de l’océan Atlantique à coup sûr peuplé de monstres. Cela lui donna sans doute l’idée d’imaginer un vaisseau grec arraché de l’océan par une tempête pour être emmené jusque sur la Lune, royaume d’Endymion et de ses armées (le nom de ce Lunien titillera bien sûr les fans des “Cantos d’Hypérion” du célèbre écrivain Dan Simmons).
Et donc, au deuxième siècle après Jésus-Christ, nous voyons des terriens s’associant aux Luniens pour faire la guerre aux armées du Soleil de Phaébus et ses Héliotes (évidemment, les négociations n’avaient pu aboutir car nous savons tous qu’incorruptibles, les Héliotes naissent… Ah ! Ah !).
S’ensuivent des guerres interplanétaires où agissent nombre de créatures étonnantes, telles les Hyppogypes, vautours à trois têtes de la taille d’un hélicoptère de combat, ou des libellules de plusieurs centaines de mètres d’envergure pas du tout amicales.

Pour autant, comme ce sera le cas pendant longtemps, les créatures intelligentes du ciel resteront à l’image des humains, hors quelques exceptions depuis Aristophane et son peuple des oiseaux. Il décrit des animaux déjà connus doués de paroles et vivant avec des règles sociales proches des humains.
Il y a peu de récits interstellaires au Moyen-Age… visiblement, Dieu a le monopole des espaces qui n’étaient pas encore conçus comme étant infinis. Tout se passe dans les sphères célestes qui sont censées maintenir chaque planète sur un support rigide tournant autour de la Terre, centre incontesté. Prophètes et saints ou familles divines ont parfois le privilège d’envols privés. Le XVIIIe siècle nous sortira quelques voyages dans les planètes, mais qui resteront souvent de pâles copies des récits utopistes tels que ceux de Savinien Cyrano de Bergerac dans ses “Voyages aux États et Empires de la Lune et du Soleil” (1657).

Au début du XIXe siècle, le meilleur du voyage spatial est sous la plume des poètes, de Victor Hugo à Edgar Allan Poe… mais il n’y a pas encore de quoi sortir un rayon laser pour “buter” un gros truc visqueux à dix-sept yeux !
Jules Verne, qui nous avait “fourgué” en 1864 des hommes préhistoriques de cinq mètres de haut gardant des mammouths au centre la Terre et autres champignons géants, ne nous fait même pas poser le pied sur la Lune en trois récits spatiaux (bon, certes, voyager sur un astéroïde dans l’un d’eux, c’était pas trop mal !).
Non, pour ce qui est des extraterrestres aux formes et fonctionnements biologiques dignes des créatures marines photographiées par Philippe Martin ou par Laurent Ballesta, autre célébrité héraultaise de l’image naturaliste, il faudra attendre un célèbre auteur anglais… Devinez lequel, en attendant la deuxième partie le mois prochain !
Par Frédéric Feu